Ce qui m’a marqué lorsque j’ai rencontré Frédéric Mezy, c’est sa capacité à lier son travail et amour de la vigne à toutes les autres dimensions de son entreprise (gestion, organisation, commerce).
Pour reprendre les mots de Loic Perrin et Stéphane Gallet (qui accompagnent les vignerons dans leur création de domaine) ou ceux écrits par Martin Cubertafond dans « Entreprendre dans le Vin », le plus complexe pour un vigneron c’est « d’être à la fois viticulteur, gestionnaire, manageur et commercial ».
Or, Pauline et Frédéric ont résolu ce problème magistralement : car au Clos des Augustins, la vigne n’est pas un simple point de départ ou un argument commercial, c’est un véritable point d’ancrage pour tout le reste.
Créer sa palette
Tout commence avec leur choix de terroirs très différents les uns des autres.
Frédéric a appris la géologie grâce à sa mère et avait donc une vision des terroirs qu’il voulait : différents types d’argiles, de calcaires, retrouver le produit des interactions avec l’eau, etc. Il a ainsi choisi ses terres en fonction des terroirs et des expositions.
En 2021, Frédéric et Pauline, sont passés des 3ha du grand-père Augustin à 58ha répartis sur 7 communes autour du Pic Saint Loup.
Pour financer cette palette de terroir, ils ont fait le choix stratégique du fermage (58ha donc, dont 35 ha en fermages).
Partir du sol, en déduire tout le reste
Pour faire simple, on pourrait schématiser l’organisation que Frédéric et Pauline ont mis en place de la façon suivante :
Tout est pensé pour que le sol et le travail de ce sol porte tous ses fruits. Et tout ce qui existe dans l’entreprise en procède directement : le commerce n’est pas un effort fait « en plus » ou « à côté », l’organisation n’est pas une contrainte pour que le reste suive, et la détermination des tarifs est sécurisée.
Le travail
Prendre en compte la vigne, d’abord la vigne, implique un travail assidu ; et le relationnel « gagnant-gagnant » que Frédéric et Pauline entretiennent avec certains de leurs distributeurs implique beaucoup : une réflexion commune en amont sur le type de vin qu’ils attendent, puis des choix d’orfèvres sur la sélection des parcelles et véritable bataillon cultural derrière.
Reste qu’à leurs yeux, ils n’ont pas construit la gamme :
« On croit qu’on a la main mise sur tout (la vigne, etc.). Mais la nature va donner ce qu’elle a à donner, et nous on en fait ce qu’on peut derrière. »
Il s’agit pour eux d’avoir le bon ressenti sur l’arôme final au moment de croquer le raisin, car ils n’utilisent pas de méthode œnologique pour le transformer.
Tout se joue donc dans les résultats des récoltes et les possibilités de ces récoltes. Eux ne font qu’apporter des intonations.
« Que ce soit l’élevage ou la vinif., c’est comme griller une pièce de bœuf : on utilise un peu de poivre un peu de sel, mais à la fin, il vaut mieux que ça ait le goût de bœuf. Sinon c’est que c’est perdu. »
S’en réjouir au quotidien
Le point crucial pour Frédéric et Pauline est donc de préserver la vie au niveau de la vigne, des vins et de tout ce qui peut en découler.
Une des conséquences géniales de cette façon de conduire leur activité, est qu’ils peuvent se réjouir pour elles-mêmes des avancées faites à la vigne.
Même si le couple est trop humble pour clamer ses succès, je citerais deux exemples simples :
1- leur travail a permis de remettre en santé des vignes récupérées sur un sol inerte.
2- leur éthique leur a permis de constater qu’en laissant la nature se rééquilibrer toute seule, au lieu de traiter aux premiers signes de vers de la grappe, leur parcelle affectée redevenait saine durablement dès la seconde année.
Il ne s’agit donc pas de s’extraire du travail de la vigne pour devenir seulement commercial ou gestionnaire. Ou encore de violenter la nature pour qu’elle corresponde au goût du consommateur. Frédéric et Pauline ont réussi le tour de force d’être avant tout vignerons, de partir de leur éthique et de leur travail, et d’en déduire tout le reste.
Le site du domaine Le clos des Augustins
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